Henri Coudreau : professeur de géographie et explorateur à ses heures perdues
Il n’y a aucune formation pour devenir explorateur. Tous les explorateurs sont animés par une même curiosité, une même passion : l’appel de l’aventure. Henri Coudreau, professeur de géographie, fait parti de ces explorateurs qui n’ont pas su résister à l’envie de découvrir les secrets de la « Grande forêt de la pluie » : l’Amazonie.
Henri Coudreau : un explorateur charentais à la conquête de la jungle amazonienne
Né en Charente-Maritime en 1859, Henri Coudreau aspire dès son enfance à devenir marin. Cependant, suite à la pression familiale, il obtient en 1880 une chaire d’histoire-géographie à l’Ecole professionnelle de Reims. Après avoir postulé en vain pour une place dans la mission transsaharienne de Flatters, il demande « un poste quelconque dans une colonie quelconque » et obtient en 1881, à 21 ans, un poste d’enseignant d’histoire et de géographie en Guyane française.
Tout en étant enseignant, Henri Coudreau rêve d’exploration et s’intéresse au métier de la cartographie. Il commence à s’organiser des voyages durant les vacances scolaires puis des missions plus officielles avec notamment l’organisation de son projet de dresser la cartographie de la Guyane; avec pour seul équipement, du matériel rudimentaire (quelques cartes, une boussole, un podomètre et un baromètre).
Henri Coudreau : apprenti explorateur
Henri Coudreau, explorateur débutant, doit encore tout apprendre du métier d’explorateur et notamment comment récupérer des fonds. Grâce à son ami Charles Maunoir, Secrétaire à la société de Géographie de Paris, il réussit par obtenir des crédits du sous-secrétariat d’Etat aux Colonies, puis du ministère de l’Instruction publique entre 1885 et 1893.
Pour sa première mission en 1883, Coudreau part explorer les territoires contestés par la France et le Brésil. Cette mission lui tient tellement à coeur, qu’il essaye de trouver des solutions d’implantation de fermes et de colons dans cette région située entre l’Oyapock et l’Araguari. Il va même au delà de ses objectifs et reçoit des avertissements de la part du gouvernement français. On appelle encore aujourd’hui cette affaire : l’affaire du « Contesté franco-brésilien ».
À la conquête de l’Eldorado : les mythiques montagnes des Tumuc-Hucmac
Les montagnes mythiques des Tumuc-Humac, la légende de l’Homme doré (l’Eldorado), la ville aux toits couverts d’or de Manoa et le Parimé captivent toujours autant. De 1887 à 1891, Henri Coudreau part d’abord pour un parcours de reconnaissance dans la partie nord-ouest dans le Haut Marouini. Il tente ensuite de cartographier la région en rejoignant la source de l’Oyapock depuis la source du Maroni. Une exploration de près de 150 kilomètres qu’il ne réalise pas en entier, contrairement à ses dires. En chemin il donne son nom à un pic : le pic Coudreau.
Les dangers du fleuve
Henri Coudreau part ensuite pour une mission un peu moins périlleuse : l’exploration de fleuves.
Lors de l’exploration des fleuves Tapagos en 1895 et Xingù en 1896, Coudreau et son équipe font face à de nombreux dangers; les rapides des fleuves, appelés “sauts en Guyane”, les sangsues, la fièvre jaune et aussi les attaques des Indiens munis de flèches empoisonnées au curare (substance extraite d’une liane et qui paralyse les muscles).
L’explorateur en herbes Coudreau est très souvent accompagné d’Apatou, connu pour avoir été le fidèle guide de Jules Crevaux. Une certaine rivalité s’est installé entre les deux explorateurs, Coudreau a pour but de faire mieux que son prédécesseur. Il prend les mêmes chemins afin de pouvoir vérifier ses observations, corrige ses cartes et croquis.
Une dernière exploration
En 1899, après sa mission sur le fleuve Yamounda, le professeur Coudreau commence à travailler au service des Brésiliens, après avoir été soupçonné d’être un agent double par les autorités françaises. Il explore alors le cours des affluents de l’Amazone afin de rechercher des régions favorables à l’exploitation forestière, à la plantation d’hévéas et à l’élevage.
Cette mission est sa dernière. Réalisant des repérages sur la rivière Trombetas, au nord de la ville d’Obidos dans l’Etat de l’Amapa, accompagné de sa femme Octavie qui l’a rejoint, Henri Coudreau est terrassé par une fièvre paludéenne à l’âge de 40 ans.
Octavie lui lève une sépulture près du lac Tapagem se servant des planches de son canot comme cercueil.
Sa femme commence à diriger, elle aussi, quelques explorations au service de l’Etat brésilien. En 1904, elle réussit à ramener les restes de son mari. Henri Coudreau, explorateur amateur, repose aujourd’hui au sein du caveau familial situé à Angoulême.
Henri Coudreau, passionné par les tribus indiennes d’Amazonie
Grâce à ses différentes expéditions, le professeur Coudreau réussit à regrouper un certain nombre de notes et de dessins représentant : coiffures, danses, vêtements et autres informations concernant les peuples amérindiens.
Passionné par les Indiens d’Amazonie, Henri Coudreau est d’abord très influencé par les clichés de l’époque les concernant et est très vite dérouté par leur attitude et notamment leur absence de volonté. En effet, les Indiens refusent de faire plus d’une heure de marche, se lèvent la nuit pour manger les provisions et vont jusqu’à se servir dans les malles de voyages du professeur.
Progressivement, le professeur change d’avis. Ayant vécu dans la forêt auprès des Indiens, il montre maintenant un véritable attachement envers ces derniers. Aussi, en désaccord avec la politique coloniale mise en place par Jules Ferry et abandonné par le gouvernement en ce qui concerne le Contesté Franco-Brésilien, Henri Coudreau commence à douter des missions qui lui sont confiées et devient un fervent défenseur des tribus en défendant l’idée d’un style de vie des tribus indiennes compatible avec celui des sociétés occidentales. En tant que professeur, Henri Coudreau ne tolère pas le comportement de l’Europe face à des tribus Indiennes incapables de se protéger et se donne comme mission de décrire le quotidien des Indiens dans ses notes et de faire l’apologie de sa nation. Coudreau préconise la solution du métissage, un mélange de la race blanche avec la race indienne. Il développe cette opinion dans son ouvrage “Chez nos Indiens. Quatre années dans la Guyane française”.
Considéré comme un apprenti explorateur, Henri Coudreau n’est pas un simple aventurier. Il laisse une véritable empreinte dans l’histoire de la Guyane et du Brésil et est aujourd'hui considéré comme l’un des principaux explorateurs des Etats de l’Amapà et du Parà.